"Nos origines font partie de notre originalité"
Francis PONGE
S’il est vrai qu’en tout domaine, qu’il s’agisse d’histoire singulière ou d’histoire collective, la connaissance des origines est indispensable pour comprendre le présent et avoir prise sur lui, cette élucidation est particulièrement nécessaire dans le domaine de l’enseignement littéraire qui repose sur une tradition vieille de plusieurs siècles.
Pour réfléchir à la question des finalités et des effets de la culture littéraire au lycée à l’aube de l’an 2000, question qui engage celle de sa légitimité, il importe de resituer cet enseignement dans son histoire ; or cette histoire, sur laquelle on s’appuie parfois pour regretter un âge d’or révolu ou se féliciter à l’inverse des progrès accomplis, est en fait fort mal connue et souvent assimilée à une histoire des institutions scolaires, rarement des contenus d’enseignement et encore moins des savoirs et savoir-faire réellement acquis par les élèves.
C’est cette dimension que nous explorons ici, à partir d’un double objet : d’un côté les textes officiels rédigés depuis 1880 pour les classes de lycée, de l’autre des devoirs d’élèves rédigés depuis cent ans, documents qui permettent d’avoir accès à deux aspects très différents et complémentaires de l’enseignement : l’enseignement tel qu’il est conçu et élaboré au niveau national, et, à l’autre bout de la chaîne, l’enseignement tel que les élèves se l’approprient ou du moins tel qu’ils en font état dans les travaux écrits par lesquels leur culture littéraire est évaluée. Par là même nous souhaitons, dans une perspective didactique*, étudier le jeu des relations qui lient le savoir à enseigner, les élèves et le maître. En effet les copies d’élèves manifestent aussi les choix du maître, aussi bien à travers le libellé du sujet que par sa notation et ses appréciations écrites.