Robert Locqueneux

Science classique et théologie

Publié le novembre 2010

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ISBN ADAPT 978-2-35656-019-3

Collection Inflexions

L’enseignement des sciences et la pratique scientifique peuvent nous donner
l’illusion qu’il y a une rationalité scientifique, universelle et intemporelle ; une
rationalité qui exclut toute idée d’alliance de la science et de la théologie.
Spontanément nos contemporains sont enclins à penser que la science et la
religion n’ont jamais pu faire bon ménage.

Nous verrons dans ce livre que, lorsqu’aux XVIIe et XVIIIe siècles la science classique fut élaborée, la théologie était au cœur de la pensée de la plupart des savants qui contribuèrent à son édification.

Cette histoire des relations de la science classique et de la théologie naturelle n’est qu’une brève histoire de ces relations ; celles-ci furent très diverses et souvent très complexes, elles furent souvent ignorées ou occultées dans les ouvrages d’histoire des sciences. Cependant chacun des chapitres – et même des paragraphes – de cet ouvrage a fait ou pourrait faire l’objet de quelques ouvrages plus ou moins épais. Ceux qui furent édités ne touchent de façon générale qu’un cercle de lecteurs fort restreint.

Ce que j’ai voulu montrer c’est qu’il est inadéquat de dresser un mur entre les sciences de la nature et la théologie et que savants et théologiens ont pu, à l’aube de la science classique se prêter la main contre un adversaire commun, le panpsychisme, contre la crédulité plus que contre l’incrédulité. Concluons que l’historien des sciences doit tenir compte de l’influence des théologies naturelle et rationnelle, ainsi que des rapports qu’elles entretiennent avec la théologie révélée, s’il veut se faire une idée exacte du développement des connaissances scientifiques en général et de la naissance de la science classique en particulier : il ne peut isoler, du moins avant le milieu du XIXe siècle, les sciences de la métaphysique et de la théologie naturelle sans laisser dans l’ombre une dimension essentielle de la pensée scientifique. J’ai montré que dans le lent, tortueux et pénible travail de recherche des concepts, des lois et des principes de la physique, la théologie avait apporté une vive motivation aux savants du temps et, parfois, les avait bardés de certitude quand elle n’avait pas été une source d’inspiration. Nulle part je n’ai dit que la théologie avait dicté les concepts et les lois de la physique, ni que leurs énoncés avaient besoin des concepts et des principes des théologies naturelles. En effet, quels que soient les a priori qui les ont inspirés, les lois de la physique ne sont retenues que si elles s’accordent avec les faits et qu’elles traduisent une masse des expériences faites. En permettant quels que soient les sources d’inspiration et le cheminement intellectuel qui, à partir d’un ensemble de lois, permettent de pressentir les principes ou postulats d’une branche de la physique, ces principes ne seront retenus que s’ils lient en une théorie un nombre plus ou moins grands de faits ; il faut admettre que ces principes sont arbitraires et qu’ils ne sont justifiés que si leurs conséquences sont en adéquation avec les faits. Il s’ensuit que les énoncés des lois et principes de la physique excluent tous concepts et règles étrangers aux phénomènes physiques tels les concepts théologiques qui ont pu aider à leur élaboration. Il est dans l’ordre des choses que la science soit oublieuse de ses origines.

L’étude du poids des convictions métaphysiques et théologiques des physiciens des XVIIe et XVIIIe siècles sur leur travail d’élaboration de nouveaux discours scientifiques ne pouvait être menée à bien sans esquisser ces travaux scientifiques eux-mêmes. Je reconnais ici un écueil pour ceux de mes lecteurs qui aborderaient pour la première fois l’histoire des sciences : croire que les savants de ces temps anciens ont consacré l’essentiel de leur temps à des questions de métaphysique ou de théologie, ce serait méconnaître leur longue patience dans l’observation des phénomènes, la mise en œuvre d’expériences souvent fort complexes et d’interprétations difficiles ou la construction d’édifices théoriques qui permettent l’interprétation de phénomènes et de résultats d’expériences qui se rangent dans des domaines de validité plus ou moins larges. C’est tout cela que j’ai banni de mon propos ou que je n’ai fait qu’évoquer, assuré que mon lecteur trouvera aisément de quoi satisfaire ses curiosités.

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