Claude Micouin

- Des logiciels libres pour une école laïque ?

L'école a-t-elle le choix ?

Publié le février 2002


L’école a-t-elle le choix ?
(US-magazine
 : 11/1999)

Certes l’école doit éviter d’habituer les
élèves à dépendre d’une entreprise
privée en position dominante et donc éviter de "choisir"
par facilité qui vous "a choisi" à travers une
démarche commerciale (cf. la licence dite School de Microsoft).
Mais promouvoir dans l’enseignement l’usage de logiciels libres va plus
loin. On s’éloigne d’une logique de consommation et on se place
dans une logique coopérative, avec des produits conçus
pour des multi-utilisateurs, pour fonctionner en réseau, et
susceptibles d’être objets d’étude et d’adaptation. Le
professeur peut adapter l’outil à ses objectifs et à sa
pédagogie.
L’exercice n’est pas évident pour autant et suppose un minimum
de culture informatique ou d’aide.

  Le plus courant est le réseau de postes sous Windows
95/98 avec serveur Linux.

  L’étape suivante est de plus en plus le "dual-boot"
où l’utilisateur choisi son système au démarrage
de la machine car en installant le système d’exploitation libre
Linux sur un poste, il est fort probable qu’on éprouvera le
besoin de conserver Windows d’où partition du disque.

 Et que faire de Linux ? Quelles applications ? Pas de
logiciels éducatifs ou culturels, du moins pas encore.
Néanmoins, on peut utiliser une suite bureautique comme
StarOffice (fichiers compatibles avec les formats courants), gratuite
dans le cas d’une utilisation personnelle sur un seul poste, accessible
aux établissements pour un coût symbolique ; on peut taper
ses textes avec WordPerfect v.8, du canadien Corel, retoucher des
images avec Gimp (inclus dans des distributions citées en
annexe, aussi puissant que Photoshop), programmer en Java ou en C++.
Pour montrer l’intérêt de l’utilisation à
l’école des logiciels libres, des sites
" expérimentaux " fonctionnent dans plusieurs
établissements. Un projet est expérimenté
actuellement à l’échelle d’une académie
(Grenoble).

Sur cette page :

| libre ne veut pas dire gratuit | de quelle liberté s’agit-il ? |
brevet-logiciel ou licence GPL ? | se procurer des logiciels alternatifs |
vocabulaire branché | à lire pour en savoir plus |

size="2">Libre ne veut pas dire gratuit

 Libre
ne veut pas dire gratuit !
(US-magazine
11/1999)

Un logiciel est libre si et seulement si son code source est
disponible, si on peut le copier, le modifier et le diffuser librement.
Un informaticien peut donc le lire, l’analyser, l’utiliser pour
produire de nouvelles applications. Il pourra alors être reconnu
comme auteur de la modification mais pas comme propriétaire
c’est-à-dire qu’il laisse à son tour le code-source
disponible.
Ceci n’a rien à voir avec la gratuité des freeware,
ou graticiels, qui restent " propriétaires ".
Les droits obtenus sont dans ce cas limités à l’usage du
produit fini. Un informaticien ne peut pas, en principe, lire le
programme et surtout n’a pas le droit d’en reprendre des segments dans
sa propre création.
Ainsi, les associations d’utilisateurs de logiciels libres agissent
pour se prémunir contre l’appropriation par un tiers d’un
patrimoine cognitif et contre une forme de détournement du droit
d’auteur au profit des entreprises "propriétaires".
Sont libres plusieurs systèmes d’exploitation (Linux, Unix, Free
BSD), le navigateur Netscape, et une pléïade d’applications
(que parfois on paye).
Sont souvent gratuits : Internet Explorer (de Microsoft), les
suites de bureautique Corel sous Linux et Star Office sous Windows, les
milliers de graticiels conçus par des amateurs du monde
entier.
Pourquoi un logiciel libre n’est-il pas gratuit, pourquoi semble-t-il
gratuit ?
Parce que le travail effectué :

  • soit a été payé une fois par l’organisme
    ayant commandé l’application,
  • soit est payé par l’institution employant le chercheur,
    l’enseignant,
  • soit vient d’un étudiant,
  • soit est considéré par l’auteur comme un œuvre
    ("d’art ?") à faire connaître.

Contrairement à une opinion répandue, les logiciels
libres sont très utilisés, en particulier sur internet et
les réseaux. Certes la puissance financière de Microsoft
est dangereuse mais seule une loi alignant l’Europe sur la
législation américaine des brevets pourrait
empêcher l’existence des logiciels libres.


De quelle liberté s’agit-il ?

L’utilisation d’un ordinateur suppose avant tout l’installation d’un
programme appelé système d’exploitation, le S.E. ou
Operating System. On peut citer Windows, le plus utilisé
(mais aussi le plus instable et le plus sensible aux virus), pour les
PC ; MacOS pour les Macintosh ; et Linux, le petit poucet
qui monte, héritier d’Unix, connu pour ses grandes
qualités de stabilité (un PC sous Linux peut
fonctionner plusieurs mois sans avoir besoin d’être
redémarré, c’est dire !) et de
sécurité (les données des utilisateurs sont
séparées et protégées, ce qui explique en
partie sa faible vulnérabilité aux virus) pour les PC et
pour Macintosh. Le S.E. est le programme de base qui gère le
matériel (processeur, mémoire, imprimante,...).
Ensuite, seulement, l’utilisateur peut faire fonctionner d’autres
programmes appelés "applications" : traitements de texte (Word,
StarOffice, WordPerfect, Abiword,...),
traitements d’image (Photoshop, Gimp,...), tableurs,
navigateurs (pour l’Internet), jeux, logiciels
éducatifs, ...
Tous ces logiciels sont soumis au respect des droits d’auteur et
à une licence d’exploitation. Celles-ci sont de plusieurs
sortes :

La licence de type "propriétaire" et
payante.


C’est la plus restrictive : l’auteur (ou la société
d’édition) vend le droit d’UTILISER le programme sur un ou
plusieurs ordinateurs. Toute copie autre que de sauvegarde est
interdite sous peine de sanctions pénales et civiles ce qui fait
de beaucoup d’utilisateurs des délinquants. Attention, notre
statut de fonctionnaire ne nous protège évidemment pas
contre d’éventuelles poursuites, même si la copie est
faite pour et dans le cadre de notre travail. Le code source, c’est
à dire la "formule" qui a permis de fabriquer le logiciel n’est
pas fourni. Seul est fourni le programme sous forme binaire,
directement utilisable par l’ordinateur mais incompréhensible
par l’utilisateur, même très averti. Il est ainsi
impossible de vérifier si un logiciel a des
fonctionnalités cachées. Il est d’ailleurs interdit de
modifier le programme, même à titre strictement personnel,
même pour corriger un bogue ! Exemples typiques : les
logiciels Microsoft.

A l’opposé, les logiciels ...libres (les
LL) et gratuits.

C’est la formule la plus libre. L’auteur autorise (et souvent
encourage) expressément la copie, la modification,
l’amélioration du programme (et la divulgation de son code
source). Seul impératif, le nouveau programme ainsi
créé doit être soumis à la même
licence, pour éviter qu’une société s’approprie un
logiciel libre après l’avoir modifié.

Entre les deux, les logiciels dits en "Open
Source".

Le programme est modifiable pour un usage personnel et le code source
est fourni (par exemple la suite bureautique StarOffice).
Dans tous les cas, il est bon de lire la licence fournie avec le
logiciel, car il peut y avoir des variantes.

Il faut aussi faire une distinction entre libre
et gratuit.

Ces deux termes se traduisent par " free " en anglais mais
certains programmes sont gratuits et non libres (Internet Explorer
de Microsoft, Netscape,...) : vous n’avez pas le droit de
les modifier (c’est d’ailleurs impossible sans le code source).

<font
color="#ff0000">Code source et "libertés"
<font
color="#000000"> 
(Us
magazine, 02/2002)

Des conséquences assez importantes découlent de
l’accès ou non au code source. Dans le cas d’un LL, n’importe
qui (de compétent) peut corriger un bogue. Dans le cas de
logiciels propriétaires, il faut attendre que l’éditeur
(lui seul peut le faire) propose un correctif. Encore faut-il qu’il le
veuille (le produit peut ne plus être développé) ou
que la société n’ait pas disparu.
Un autre aspect intéresse chacun, utilisateur ou non d’un
ordinateur. N’oublions pas que l’informatique c’est " le
traitement automatisé de l’information ". En utilisant un
programme pour consulter un site Web, votre ordinateur pourrait,
à votre insu, livrer au serveur consulté des
données confidentielles contenues sur votre disque dur ! A
des fins commerciales peut-être. Mais ce pourrait être
aussi votre médecin qui laisse partir à son insu des
informations sur votre état de santé ! Les
soupçons qui ont pesé sur Microsoft d’avoir
collaboré avec le NSA (les " grandes oreilles
américaines ") pour espionner des entreprises
européennes sont techniquement plausibles. Dans le cas d’un LL,
il est possible de consulter le code source pour vérifier si cet
espionnage existe. Dans le cas contraire, c’est tout bonnement
impossible...


Brevets de logiciels ou licence GPL ?

Actuellement, le développement des LL est très important
et concurrence très fortement les logiciels
propriétaires. Cependant, l’existence des LL n’est pas du
goût de tout le monde, principalement des grandes multinationales
qui y voient une perte de pouvoir et de revenus. Un très fort
lobbying est fait auprès des administrations européennes
et nationales pour rendre possible le brevet logiciel en Europe.
Celui-ci existe aux USA et au Japon avec des conséquences
extrêmement néfastes.

En effet, les logiciels sont, c’est normal, protégés par
le droit d’auteur pour empêcher que quelqu’un ne s’approprie
indûment le travail d’un autre. Le brevet, lui, ne protège
pas les logiciels eux-mêmes, mais permet de s’approprier les
concepts sous-jacents. Par comparaison, les oeuvres littéraires
sont protégées de la copie illicite et du plagiat ;
mais l’écriture des romans de cape et d’épée est
libre et il n’est pas besoin de demander l’autorisation aux
héritiers d’Alexandre Dumas pour en écrire un ; de
même, Picasso n’a pas breveté le cubisme et les formules
mathématiques ne le sont pas plus.

L’adoption du brevet logiciel sur le vieux continent serait un
véritable " Tchernobyl informatique " en bloquant
l’innovation et la création libre au profit de grosses
sociétés disposant d’importants moyens financiers pour se
payer dépôts de brevets et cabinets d’avocats, pour
assurer leur domination. Les récentes affaires de brevets sur
les médicaments dans des pays du tiers-monde (Cf. Afrique du Sud
et le SIDA), le brevetage de séquences d’ADN (matériel
génétique) participent du même mouvement.

(Us magazine, 02/2002)

Actualité 06/03 : Une des
conséquences de la mondialisation : les brevets de logiciels

Les logiciels libres connaissent un succès grandissant et
commencent à faire de l’ombre à de très grosses
sociétés dont MicrosoftTM qui craint de perdre
son monopole sur les PC et la bureautique (Openoffice.org®
contre MSOffice®, Linux® contre Windows®
et Apache dans les serveurs) et ainsi sa mainmise sur
l’informatique à l’école. Cette concurrence n’est pas de
leur goût. Or, ces sociétés viennent de trouver une
aide de la Commission européenne (et de l’Office Européen
des Brevets) avec un projet de directive examiné en ce moment
par le Parlement européen. Celle-ci, si elle était
adoptée, légaliserait le brevet de logiciel et
permettrait ainsi à ces grosses sociétés,
bardées d’une armée d’avocats, d’éliminer la
concurrence des logiciels libres (et celle des graticiels et
partagiciels) à grands coups de procès et de
" terrorisme judiciaire ", de conserver et d’amplifier de
façon durable leurs quasi-monopoles sur toute la planète
et d’aggraver les inégalités, notamment en matière
d’éducation.
Des conséquences du même genre ont eu déjà
lieu avec des brevets sur le vivant et les séquences
génétiques. Ainsi, on peut lire sur <a
href="http://www.caducee.net/breves/breve.asp?idp=1&idb=2417"
target="_blank">http://www.caducee.net/breves/breve.asp?idp=1&idb=2417 :
"La société américaine Myriad GeneticsTM a
déposé un brevet (auprès de l’OEB) sur un test de
dépistage utilisant des séquences du génome
humain... La seule utilisation de la séquence décrite
dans le brevet pour réaliser d’autres méthodes de
comparaison à des fins diagnostiques de prédisposition
aux cancers est désormais interdite à tout autre
laboratoire sous peine de poursuites pour contrefaçon... La
société Myriad Genetics ne souhaite accorder aucune
licence d’exploitation de ses tests. Elle oblige [...] les laboratoires
d’analyse génétique européens [...] à
envoyer leurs prélèvements à Salt Lake City. [...]
Les opposants au brevet soulignent que [...] le coût est trois
fois supérieur aux tests réalisés en France."

(Us magazine, 06/2003)

Pour en savoir plus voir notre page de liens

La
licenceGPL

Vous verrez souvent apparaître la mention
suivante sur des logiciels libres ou des textes et oeuvres
numérisées disponibles sur Internet :

Ces articles sont soumis à la licence libre GPL, c’est
à dire que la reproduction exacte et la distribution
intégrale sont permises sur n’importe quel support, à
autant d’exemplaires que vous le désirez, pourvu que cette
notice et les mentions de copyright soient préservées.

Pour en savoir plus, consultez par exemple la traduction suivante (non
officielle) avec renvoi sur le texte original en anglais : <a
href="http://www.april.org/gnu/gpl_french.html" target="_blank">http://www.april.org/gnu/gpl_french.html


Se procurer des logiciels libres etc.

(Us magazine, 02/2002)

Comme la plupart des LL sont gratuits, ils sont hors commerce et ne
font pas l’objet de promotion. L’auteur, bénévole, ne
peut investir dans la publicité. De ce fait, ils sont peu ou pas
connus, à l’inverse de ceux produits par les gros
éditeurs que vous trouvez en magasin ou
pré-installés sur votre PC. Donc, il faut aller à
leur recherche sur le Net (c’est la source d’approvisionnement la plus
directe mais, pour des programmes dépassant les 10 Mo, le temps
de téléchargement avec un modem est assez important),
dans les centres académiques de ressources informatiques, les
CDDP ou dans certains magazines comme Freelog ou Login.
On peut parfois avoir intérêt à payer car acheter
à prix symbolique un cédérom avec StarOffice
(ou une revue le proposant sur un cédérom)
économise une connexion longue et permet une
réinstallation rapide au besoin. De toute façon, on peut
en faire profiter proches et collègues, la copie étant
autorisée. Une simple recherche sur le Net avec les mots
"graticiels" ou "logiciels libres gratuits" affiche une longue liste de
sites. Certains logiciels sont en anglais, mais les auteurs acceptent
souvent volontiers l’aide de bénévoles bilingues pour des
traductions...

Vous pouvez aussi passer par
notre page de liens du "libre" ou nos pages de liens
disciplinaires.

<font color="#ff0000"> Des cédéroms pour une informatique libératrice ?

(US-magazine
 : 11/1999)

Système
d’exploitation Linux

Le caractère commercialement non structuré de Linux fait
qu’il en existe plusieurs "versions" appelées distributions.
Consultez notre page Linux et démonstrations de Linux

Suites de bureautique gratuites ou presque
Adressez vous à votre CRDP ou à votre centre de
ressources en informatique. Pour chaque logiciel traité dans un article, nous donnons au moins une adresse.

Logiciels divers
Si vous n’êtes pas sur le réseau, prenez contact avec
l’EPI, 13 rue du Jura, 75013 - Paris. Sinon voyez nos liens ou ceux de
l’EPI http://www.epi.asso.fr


Vocabulaire branché


Quelques définitions
complémentaires


 Un "freeware" ; est du domaine public en ce sens qu’il est à la
disposition de tous, gratuit et libre de droit (à condition de
ne pas le modifier).

 D’un logiciel commercial, l’utilisateur n’achète qu’une
licence d’exploitation, la loi autorise une copie de sauvegarde, aucune
modification n’est permise.

 Un "shareware", ou logiciel contributif, est gratuit pour une
période d’essai mais une contribution doit être
versée pour l’utiliser durablement.


<font
color="#000080" size="3" face="Arial">A lire pour en savoir plus


 Un ouvrage très accessible  : Linux. Toutes
distributions
de M. Wielsch chez MicroApplication (environ 10 Euros
sans CD).

 Le hold-up planétaire ou la face
cachée de Microsoft
de Roberto Di Cosmo chez
Calmann-Lévy.


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