D Rallet, FSU ; S Charrier, JF Clair, JP Hennuyer, P Laîné (SNES) ; Alain Prevot

De la loi DADVSI à l’exception pédagogique

Droit d'auteur et droits dérivés : droits et obligations de l'enseignant

Publié le 1er juin 2006

Les outils informatiques modifient considérablement les possibilités d’échange et de copie de textes, images fixes ou animées, musiques et documents sonores, données... Ce n’est d’ailleurs pas le premier évènement de cette importance : papier dans l’empire arabo-musulman, imprimerie, radio,...
Entre volonté de faire connaître et d’analyser librement savoir et création, volonté d’exploiter tout marché potentiel, ou souci de reconnaissance et de rémunération du travail, des systèmes de valeurs et des intérêts, peut-être inconciliables, s’affrontent. L’évolution, nécessaire, de la loi pourrait bien prendre mieux en compte les appétits du plus fort que l’intérêt collectif. L’école est impliquée, faisons le point.

Sur cette page :

| DADVSI | La situation pédagogique |
Exception pédagogqiue | Accords du 27 février 2006 |
Pour en savoir plus | Commentaire du débat au Sénat |

size="2">DADVSI

DADVSI, loi relative au Droit d’Auteur et aux Droits Voisins dans la Société de l’Information

Les grandes lignes du texte

En mars 2006, le gouvernement a déposé un projet de loi pour transposer une directive européenne du 22 mai 2001, en vue d’adapter le droit aux évolutions des technologies numériques.
Il a présenté le débat comme opposant des pratiques de piratage du fait de téléchargements gratuits par Internet d’oeuvres musicales ou de films grâce aux logiciels P2P (de pair à pair) aux droits des auteurs, des artistes et des maisons de production qui seraient spoliés. Les choses sont en fait bien plus compliquées. Les réseaux d’intérêts entre opérateurs de téléphonie, fournisseurs d’accès à Internet, éditeurs de logiciels (Microsoft), fabricants (Apple, Sony), distributeurs (Fnac, Virgin) et maisons de disques (Vivendi, Warner,...) sont très complexes. D’autre part, seuls les auteurs à succès ont partie liée avec les maisons de disques. Lesquelles cherchent en fait à préserver un modèle économique centré sur une sélection étroite des artistes (ou des films) et des investissements de marketing dont ont assure la rentabilité par des produits à succès.
Or les technologies numériques permettent le développement d’un autre mode d’accès à la culture, fondé sur le partage et l’interactivité. Les maisons d’édition prônent au contraire un verrouillage des accès par les fameux DRM, mesures techniques permettant de contrôler l’usage des œuvres numériques, de limiter les copies privées (on pourra prêter un livre, pas un DVD ou un CD) et de contraindre le consommateur à lire l’œuvre au moyen de logiciels et d’appareils d’une marque particulière (pas d’interopérabilité). Ces DRM constituent une menace pour les logiciels libres et font planer sur les nouvelles technologies l’ombre du Big Brother qui surveille notre vie privée.

 Texte adopté par l’Assemblée nationale sur le site de l’Assemblée

L’analyse du SNES

Sur un sujet aussi important, le gouvernement a adopté la procédure d’urgence (une seule lecture au Parlement) et a voulu prendre de vitesse le débat qui s’est instauré dans l’opinion. Dans le domaine de l’éducation et de la recherche, les ministres de l’éducation et de la culture ont, fin février, signé en secret cinq accords avec les ayants droit entravant sérieusement la possibilité d’utiliser des documents numériques en classe ou sur les sites d’établissement. Le SNES dénonce la loi DADVSI car elle ne respecte pas le nécessaire équilibre entre respect du droit des auteurs et droit pour tous d’accéder à la culture et à la connaissance. Elle privilégie de façon unilatérale les intérêts de certains lobbies économiques. Cette loi fait également peser une menace sur les libertés et la protection de la vie privée en légitimant la présence de verrous espions dans les fichiers numériques.

Le SNES estime que les nouvelles pratiques culturelles, fondées sur le partage et l’interactivité, permises par les nouvelles technologies, doivent pouvoir se développer, ce qui implique un large débat démocratique pour trouver un modèle économique qui, tout en respectant les droits des auteurs et des artistes, soit tourné vers l’avenir.

Le SNES estime que le vote du Sénat en faveur d’une exception pédagogique est un signe positif (ne sera en vigueur qu’à partir de 2009) mais déplore que le principe de l’interopérabilité adopté par l’Assemblée nationale ait été supprimé par le Sénat, ce qui est une négation des droits des consommateurs et porte atteinte au développement des logiciels libres.

Les textes votés par l’Assemblée et par le Sénat sont trop différents pour que la conciliation par une commission paritaire mixte de 10 députés et sénateurs puisse trouver des solutions légitimes. Il faut une seconde lecture devant l’Assemblée, qui permettrait un débat démocratique avec l’ensemble des acteurs concernés.

Daniel Rallet

La mobilisation doit s’intensifier
 Dossier sur le site du SNES
 S’informer et signer la pétition NON au projet de loi DADVSI lancée en décembre 2005(signée par environ 200000 particuliers et plus de 930 organisations, dont le SNES et la FSU)
 Beaucoup d’informations sur les dossiers et les mobilisations : http://collegedesmediateurs.info
 Protestation des bibliothécaires et documentalistes, sur le site de l’Interassociation Archives-Bibliothèques-Documentation


La situation pédagogique

Enseigner, dans le respect du droit actuel ?

 IDD,TPE, EEDD, ... Casse tête !

  • Dans ces dispositifs, les élèves sont amenés à produire des travaux (dossier, affiche, exposition...) à l’aide de « l’incontournable et inépuisable réservoir de connaissances » d’Internet. Mis à part le plagiat - fléau du reste peu combattu - à chaque fois les mêmes questions : ont-ils le droit de copier ce croquis ? cette photo ? de montrer les travaux hors de la classe, aux parents ? aux visiteurs d’une journée « Portes ouvertes » ? Peut-on les mettre sur l’Intranet ? sur le site de l’établissement ?....Comment ne pas se mettre hors la loi ? comment faire ? Des sites remarquables existent : ci on peut se servir librement, là il y a des droits. Devra t-on tout vérifier ? Le pourra t-on ? Tout appui pédagogique avec les fameuses « TICE » deviendrait un vrai casse tête !

Patrick Laîne

  • Bien des choses peuvent être en effet utilisées, sous couvert tantôt de la licence libre à laquelle adhère un site, tantôt des contrats forfaitaires, bientôt de l’amendement du Sénat. Attention... le plus souvent le dossier ne pourra pas sortir de l’établissement, et une exposition à l’intention des parents pourrait être l’objet d’un litige.

 Quand documentaliste et professeur d’histoire font travailler leurs élèves sur l’esclavage, est-ce bien un "travail citoyen" ?

  • En E.C.J.S. nous venons de travailler sur l’esclavage. Nous avons fait un travail de sensibilisation avec des productions audiovisuelles du CNDP, des émissions libres de droit signalées par Télédoc. Nous avons utilisé, évidemment, les ressources du CDI mais aussi Internet dont une intéressante compilation de documents du CRDP de Nice
    Certains groupes sont revenus travailler seuls ou ont continué chez eux. Nous leur avons proposé de valoriser leur travail en le publiant sur l’intranet du lycée. Malgré notre insistance sur la nécessité de citer les sources et de légender les illustrations tout n’était pas au rendez vous. Deux filles avaient tenu à mettre un extrait d’un CD de chants d’esclaves emprunté à la médiathèque. Est-ce légal ? Peut on vraiment nous reprocher cette utilisation d’extraits de CD ? d’images non légendées ? Nous avons insisté sur la nécessité d’une bibliographie-webographie mais les élèves ignoraient la nécessité d’avoir l’accord préalable pour établir un lien. Alors coupables ?

Jean Pierre Hennuyer

  • Dans la plupart des cas, la présentation en accès libre sur l’Internet serait illégale. Sur un intranet ou un extranet sécurisé par mot de passe, cela dépend de l’oeuvre (nature, type de gestion des droits, longueur de l’extrait). En revanche, les contrats forfaitaires signés, malgré des ambiguïtés, permettent de faire travailler assez librement les élèves sur des documents numériques (y compris avec images, son, données... voire l’intégralité d’un film) ou des dossiers-papier (à condition qu’ils ne partent pas avec ?). Dans tous les cas, il faudrait consacrer un temps considérable à s’informer, remplir des déclarations, négocier : irréaliste...

 Education musicale : sortir de l’hypocrisie !

  • L’écoute et l’analyse d’œuvres font partie des programmes au collège et au lycée. Les élèves doivent par exemple, en 6e, « reconnaître les oeuvres écoutées et identifier leurs principales composantes musicales ». Les pratiques d’enseignement se sont enrichies du travail sur « les interactions images-sons ». Les élèves doivent travailler sur « les fonctions de la musique dans des productions visuelles diverses : spot publicitaire, clip, film ».

L’utilisation pédagogique d’une œuvre n’est pas assimilée à l’exception de copie privée (article L122-5 du code de la propriété intellectuelle) : dans tous les cours d’éducation musicale aujourd’hui, les enseignants sont donc hors la loi, car ils diffusent des extraits musicaux ou vidéo aux élèves. Et ils sont conscients de cette « insécurité » mais les contenus disciplinaires qu’ils doivent enseigner ne permettent pas de faire autrement !

Sandrine Charrier

  • Depuis février 2006, au prix d’un forfait payé par le ministère, les oeuvres gérées par les principales sociétés françaises de gestion de droits sont utilisables, de même que ce qui est diffusé gratuitement sur le réseau hertzien, et on peut même faire jouer certaines partitions ! Si vous n’ouvrez pas trop la porte de la classe, bien sûr ! Et pas d’imprudence : la vidéo du commerce n’est pas un achat "légal" pour la classe ! Cela semble plus simple pour un CD-audio mais quelles modalités de déclaration et qu’en sera-t-il en 2009 ? L’amendement concernant l’exception pédagogique devrait permettre de sortir de l’illégalité à partir de 2009. Mais, pour les seuls extraits ?

Attention : sur la base des accords, on n’a droit qu’à des copies provisoires, donc pas d’armoire ou de disque dur où ranger soigneusement notre matériel de travail ?


Exception pédagogique

Le Sénat réintroduit l’exception pédagogique

Le Sénat a amendé le projet de loi DADVSI présenté par le gouvernement (ministères de la Culture et des Affaires Familiales) et voté par L’Assemblée nationale. Alors que les députés n’avaient pas introduit d’exception pédagogique (comme le texte européen le permettait), le Sénat en a introduit une en faveur de l’enseignement et de la recherche qui concerne les droits d’auteurs, les droits voisins et ceux des producteurs de bases de données. Cette exception « autorise la représentation ou la reproduction de courtes œuvres ou d’extraits d’œuvres à des fins exclusives d’illustration ou d’analyse dans le cadre de l’enseignement et de la recherche, sous réserve que le public auquel elles sont destinées soit strictement circonscrit à un cercle majoritairement composé d’élèves, d’étudiants, d’enseignants et de chercheurs directement concernés ».

Toutefois, des accords ayant été passés entre le MENRT (qui n’a pas rédigé d’article de cette loi) et des ayants droit, elle n’entrerait en vigueur que le 1er janvier 2009. Ces contrats ainsi que l’exception votée sont rémunérés sur une base forfaitaire négociée. Une commission Assemblée nationale - Sénat est constituée... Affaire à suivre.

 Exception pédagogique votée par le Sénat sur le site du Sénat
 Directive européenne 2001/29/CE, voir article 5.3.a.

L’avis du SNES

Si le texte du Sénat est une avancée, il est très en deçà de ce dont les enseignants ont besoin (et de ce que la commission européenne permet). Selon média ou usage, l’exception est tantôt moins restrictive tantôt plus restrictive que les accords. Le droit d’auteur doit être respecté et protégé. Mais, même avec une telle loi, nous continuerons d’être hors la loi. Comment peut-on ne travailler que sur de courts extraits ? Quand et comment saura-t-on qu’une œuvre est libre de droit ou ne l’est pas ? Qu’en est-il des extraits de pages web, des liens mis dans des documents réalisés par les élèves ou les enseignants ? Comment pourrons nous utiliser des bases de données dans le cadre de notre activité professionnelle ? Le cadre est trop restrictif pour que la liberté pédagogique puisse s’appliquer.

Pour les enseignants, il faut pouvoir utiliser dans le cadre professionnel toute œuvre de manière libre, en n’ayant comme obligation que de citer les sources et de ne pas en faire une exploitation commerciale. Ce ne sont ni les enseignants ni les conseils d’administration qui doivent se préoccuper de payer des droits, mais bien le Ministère, et ce de façon globale. Le principe même de tels droits est contestable quand il ne s’agit pas d’oeuvres spécifiquement conçues pour l’enseignement.

Il doit y avoir une exception pédagogique concernant l’enseignement dispensé par l’Etat (formation initiale et continue), et une autre concernant les prestataires faisant commerce de la formation.

Jean-François Clair

 Pétition pour une véritable exception pédagogique : http://exception.politechnicart.net/


Accords du 27 février 2006

Ces contrats, conclus entre notre ministère et les sociétés de perception de droits, concernent éducation (y compris enseignement supérieur) et recherche, moyennant paiement de droits forfaitaires, sont expressément limités à la formation initiale. Les autorisations portent sur l’illustration du cours et c’est la représentation qui est autorisée, dans l’enceinte de l’établissement, non pour l’oeuvre elle-même mais pour étayer un enseignement, une analyse... ou réaliser une évaluation. Si donc vos élèves travaillent sur un document papier ou un fichier numérique, il n’est pas évident qu’ils puissent l’emporter chez eux.

Ils peuvent cependant d’en servir pour un exposé, un mémoire qui peut être mis sur l’intranet. Si on décide de rendre un cours ou un dossier accessible de l’extérieur (extranet), l’accès doit être limité par mot de passe au public défini (les élèves concernés). Pas question donc de mettre ces travaux à disposition de tous (parents d’élèves, lycéens du "monde entier" faisant le même type recherche). Les travaux ou extraits reproduits doivent être insérés dans le travail pédagogique et non accessibles comme documents séparés. La thèse universitaire peut être mise sur le réseau Internet.

Colloque ou conférence sont concernés mais le public reste limité aux élèves, étudiants, chercheurs et il s’agira alors toujours d’extraits (sauf arts visuels). Donc pas inviter les parents d’élèves par exemple peut être source de litige !

Auteur et titre doivent apparaître sauf si l’objectif est leur identification par les élèves.

Ces contrats ne remettent pas en cause ce qui concerne les photocopies. Résultat : la même oeuvre, acquise sur un DVD, un CD, le Web... ou sur un livre n’est pas utilisable de la même manière !

Évidemment toute utilisation commerciale est interdite et les oeuvres doivent avoir été acquises "régulièrement" (?). On ne sait pas s’il est régulier d’apporter en classe un CD acheté personnellement, on imagine que oui. Ces accords excluent les produits réalisés pour l’enseignement.

Les règles sont modulées selon le type d’oeuvre
 Arts visuels (y compris architecture).
La notion d’extrait ne s’applique pas ici. Le nombre est limité à 20 par séquence et à 400x400 pixels (1/3 de la largeur d’un écran).

 Oeuvres cinématographiques et audiovisuelles.
L’accord concerne toute oeuvre diffusée par voie hertzienne non payante (télés sans abonnement, radios) on ne peut toujours pas utiliser en classe les cassettes VHS ou DVD du commerce ! Attenetion, si on s’adresse à plus qu’une classe il faudra se limiter à des extraits (10 à 15% selon les modalités).

 Musique.
Écouter ou interpréter sont autorisés (dans la classe). En conférence, examen... on revient à des extraits (inférieur à 30 secondes...). On ne sera plus toujours dans l’illégalité (mais attention, toute oeuvre n’est pas visée par l’accord). L’utilisation sur intranet ou extranet suppose des démarches spécifiques.

 Partitions.
Limite de 5% ou 2 pages.

 Périodiques imprimés (pédagogie, recherche).
Représentation autorisée, pas la distribution, dans une perspective pédagogique en dehors de toute de compilation.

 Livres.
Extraits inférieurs à 5 pages dans la limite de 20% (4 pages et 5% pour un manuel scolaire).

 Texte des 5 accords signés, sur le site Polytechnicart

 Mais toutes les oeuvres sont-elles concernées ? Non, seulement celles pour lesquelles les sociétés de perception de droit ont été mandatées. On est donc censé consulter des répertoires d’oeuvres : ADAGP ; SCAM ; SAIL. Puis déclarer l’utilisation à l’AVA ! Irréaliste ! Il faudrait associer un poste de secrétariat à chaque poste d’enseignant !

 Il s’agit d’un contrat : le MEN paie une redevance annuelle.

 Dans tous les cas on est censé se limiter à des "reproductions temporaires".

 Bien sûr, sur l’Internet, des sites précisent ce qui est possible, certains sites ne comportent que des oeuvres libres pour l’éducation...


Pour en savoir plus

 Code de la propriété intellectuelle etc., Légifrance, site du gouvernement


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color="#000080" size="3" face="Arial">Exception pédagogique : commentaire

Commentaire de l’exception pédagogique et du débat au Sénat

 La directive européenne a proposé une liste de 20 exceptions aux droits exclusifs des auteurs dans lesquelles les Etats pouvaient puiser pour transposer la directive.

  • Prenons l’exemple d’une bibliothèque publique, qui utilise de plus en plus des supports numériques à des fins de conservation des œuvres et évidemment de communication au public. Sans exception, elle serait contrainte de négocier chaque usage, chaque condition d’utilisation des ressources numériques qu’elle met à disposition du public. Elle aurait intérêt à le faire car ces usages seraient contrôlés par deux moyens : les DRM, les perquisitions à domicile. Deux problèmes : cela lui coûterait cher, cela la placerait dans la situation infernale de devoir connaître les droits existant sur une œuvre (c’est loin d’être simple puisque par exemple des droits courent sur des films tombés dans le domaine public !) et il faudrait que la bibliothèque embauche quelqu’un qui se consacre à ce travail.
  • L’exemple est complètement transposable à l’enseignement.

 Le texte complet du Sénat

« a) La représentation ou la reproduction de courtes oeuvres ou d’extraits d’oeuvres, autres que des oeuvres elles-mêmes conçues à des fins pédagogiques, à des fins exclusives d’illustration ou d’analyse dans le cadre de l’enseignement et de la recherche, à l’exclusion de toute activité ludique ou récréative, et sous réserve que le public auquel elles sont destinées soit strictement circonscrit à un cercle composé majoritairement d’élèves, d’étudiants, d’enseignants et de chercheurs directement concernés, que leur utilisation ne donne lieu à aucune exploitation commerciale et qu’elle soit compensée par une rémunération négociée sur une base forfaitaire nonobstant la cession du droit de reproduction par reprographie mentionnée à l’article L. 122-10"

" b. Les dispositions du a s’appliquent à compter du 1er janvier 2009."

 Commentaire

  • Le rapporteur, a avancé trois arguments pour adopter l’exception pédagogique : - Elle est prévue par la directive européenne - La quasi-totalité des pays européens l’ont adoptée - Les accords signés ne sont pas satisfaisants car trop restrictifs.
  • Un amendement a permis de remplacer strictement par majoritairement pour éviter que la vieille dame qui assiste à une leçon au Collège de France doive sortir de la salle quand on projette un extrait d’œuvre : « sous réserve que le public auquel elles sont destinées soit strictement circonscrit à un cercle composé majoritairement d’élèves, d’étudiants, d’enseignants et de chercheurs directement concernés ». Est-ce que cela permet à un élève d’utiliser un extrait chez lui ? Sans doute.
  • L’exception pédagogique ne concerne que les extraits d’œuvres (ou les courtes œuvres, un sénateur ayant fait remarquer que des poèmes japonais ne contiennent que deux vers. Le problème reste donc entier pour les œuvres.
  • Il y a eu un accord général pour « qu’elle soit compensée par une rémunération négociée sur une base forfaitaire ». Pourtant, cette contrepartie ne semble pas exister dans d’autres pays. Elle n’existe pas pour l’exception des bibliothèques et musées. Les universités se plaignent de verser déjà 2,4 millions d’euros pour les droits de photocopies et 1,5 millions au titre du droit au prêt. Le rapporteur et des sénateurs ont insisté sur le fait que la compensation pour les droits numériques venait en plus de celle qui existe déjà pour la reprographie, d’où la formule : « nonobstant la cession du droit de reprographie... ». D’autre part, la mise en œuvre de la loi à partir du 1-1-2009 supposera des négociations pour établir le montant des rémunérations forfaitaires et les détails des droits autorisés. Avec le risque que les accords qui auront été appliqués pendant deux ans inspirent beaucoup les textes d’application de la loi !
  • Pour ne pas déjuger les deux ministres signataires et pour respecter la démarche contractuelle, les sénateurs ont adopté un amendement disant que les cinq accords s’appliquent jusqu’eu 31/12/2008 et l’exception après le 1er janvier 2009.
  • Les Sénateurs ont critiqué des accords contractuels trop restrictifs, mais en même temps il ont insisté pour ne pas voter « une exception trop large et trop imprécise » ! On est en effet loin du texte proposé par la directive européenne :
    L’utilisation à des fins exclusives d’illustration dans le cadre de l’enseignement ou de la recherche scientifique, sous réserve d’indiquer, à moins que cela ne s’avère impossible, la source, y compris le nom de l’auteur, dans la mesure justifiée par le but non commercial poursuivi.
    L’exception est en effet moins restrictive que certains des accords : on n’y trouve pas les pixels, les 3O secondes d’œuvres, les 6 minutes de film, ni le principe des perquisitions dans les établissements.
  • Le vote de l’exception est un donc signe positif, mais très modeste !

Daniel Rallet


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